Le Conseil constitutionnel de la France se trouve actuellement au cœur d’un dilemme politique majeur concernant l’inéligibilité de Marine Le Pen. Selon la décision qu’il rendra, la question de savoir si l’acharnement judiciaire à l’encontre de la dirigeante du Rassemblement National persistera ou si ses opposants pourront reprocher au Conseil d’ouvrir la voie à une force qu’ils jugent autoritaire et antidémocratique se pose.
Il est rare que les neuf membres du Conseil constitutionnel soient aussi directement impliqués dans un débat politique d’une telle ampleur, avec des implications directes sur un scrutin décisif comme l’élection présidentielle à venir. Laurent Fabius, dont ce sera l’une des dernières décisions à la tête de l’institution, et Alain Juppé, déjà confronté par le passé à une peine d’inéligibilité avant de revenir sur le devant de la scène politique, sont attendus pour analyser non seulement les conséquences juridiques de cette affaire, mais aussi les répercussions démocratiques, politiques et sociales.
La question centrale demeure : est-il constitutionnel d’appliquer une peine d’inéligibilité de façon conservatoire, alors même que la condamnation de Marine Le Pen fait l’objet d’un appel ? Cette question technique n’a jamais eu un tel poids, car la décision pourrait influencer non seulement l’élection présidentielle à venir, mais aussi orienter l’avenir politique du pays, notamment si une victoire de Marine Le Pen en 2027 devient plausible.
Marine Le Pen a déjà exprimé son scepticisme à l’égard des mesures d’inéligibilité, soulignant un sentiment général de partialité de la justice. Il y aurait ainsi une ironie à ce que le Conseil constitutionnel soit celui qui, potentiellement, sauve la carrière d’une responsable politique qui n’a cessé de critiquer l’institution.Si elle était élue, la plus haute juridiction du pays deviendrait le seul rempart à l’une des mesures phares de son programme : une modification de la Constitution pour limiter l’immigration.
En vertu de l’article 11 de la Constitution, le président peut organiser un référendum législatif, et Marine Le Pen souhaite l’utiliser pour modifier la Constitution, une démarche rendue possible une seule fois dans l’histoire par le général de Gaulle en 1962. Dans cette optique, le Conseil constitutionnel pourrait devenir l’obstacle majeur à la mise en œuvre de la promesse la plus emblématique de Marine Le Pen, une situation qui alimenterait encore la défiance du Rassemblement National à l’égard de l’institution.
En effet, la dirigeante du RN a déjà critiqué publiquement la composition du Conseil constitutionnel, notamment lors de l’examen de la réforme des retraites, lorsqu’elle estimait que l’institution manquait d’indépendance et de détachement vis-à-vis des partis politiques.
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