Depuis 2016, le Bénin a entrepris une série de réformes majeures pour renforcer son système judiciaire et le rendre plus accessible, transparent et efficace pour les citoyens. Ces réformes ont permis de moderniser le secteur de la justice, d’améliorer son fonctionnement et de rapprocher les services judiciaires des citoyens, avec un impact notable sur la qualité du service rendu. Yvon Détchénou, Garde des Sceaux est monté jeudi 12 février 2025, au créneau pour en faire le point.
Jusqu’en 2016, le secteur de la Justice était régulièrement perturbé par des grèves, empêchant les justiciables d’accéder à leurs droits. Les tribunaux étaient fréquemment fermés pendant de longues périodes, rendant impossible la délivrance de documents administratifs essentiels tels que les casiers judiciaires, les certificats de nationalité ou les jugements. Cela créait des désagréments pour les citoyens, les entreprises et les autorités publiques.Aujourd’hui, grâce à une meilleure gestion des grèves et à des réformes proactives du gouvernement, la justice est devenue plus disponible. Les citoyens peuvent désormais obtenir des documents judiciaires en ligne, éliminant ainsi de nombreuses tracasseries administratives. Avant 2016, le Bénin comptait 14 tribunaux et 3 Cours d’appel.
L’accès aux services judiciaires était particulièrement difficile pour les habitants des régions éloignées, qui devaient faire face à des coûts de transport élevés et à des infrastructures insuffisantes. Pour y remédier, depuis 2016, le gouvernement a créé 7 nouvelles juridictions et 13 bureaux d’orientation des usagers dans tout le pays, facilitant ainsi l’accès à la justice pour tous. Afin de répondre aux besoins spécifiques des justiciables, plusieurs juridictions spécialisées ont été mises en place.
Celles-ci traitent des affaires commerciales, criminelles, foncières, ce qui permet une gestion plus rapide et plus technique des dossiers. Par exemple, la Cour de Répression des Infractions Économiques et du Terrorisme, créée en 2018, a traité 4 540 dossiers de 2018 à mars 2022, mettant en lumière son efficacité dans le traitement des affaires complexes. La Cour spéciale des affaires foncières, quant à elle, se concentre sur les questions liées à la propriété foncière dans les communes de son ressort. Ces réformes permettent aux citoyens de bénéficier de décisions judiciaires plus rapides, tout en garantissant une expertise approfondie dans des domaines spécifiques du droit.
Un autre levier important de la réforme judiciaire au Bénin a été l’augmentation des effectifs dans les juridictions. Avant 2016, le pays comptait 212 magistrats et 174 greffiers, mais aujourd’hui, ce nombre a considérablement augmenté : il y a désormais 336 magistrats et 220 greffiers en activité. De plus, 80 nouveaux magistrats sont actuellement en formation, et le recrutement de 100 greffiers est en cours.Ces efforts visent à garantir que les juridictions disposent d’un personnel suffisamment qualifié pour faire face à l’augmentation du nombre de dossiers à traiter, et à répondre aux besoins croissants de la population.
La digitalisation des services judiciaires
Un autre point majeur de cette réforme a été la digitalisation des services judiciaires, notamment la mise en ligne des demandes de casiers judiciaires, facilitant ainsi leur délivrance. Avant 2016, les citoyens devaient se rendre dans le tribunal de leur lieu de naissance pour obtenir ces documents, ce qui était non seulement coûteux, mais aussi long et incertain. Depuis 2020, la procédure est entièrement numérisée, permettant à près de 538 000 casiers judiciaires d’être délivrés à ce jour. Cette digitalisation a également simplifié la création d’entreprises grâce à la plateforme monentreprise.bj, qui permet de réaliser ces démarches en ligne.En outre, toutes les juridictions du pays sont désormais connectées à internet, avec 18 sur 23 ayant accès à la fibre optique.
Cette connectivité améliore la communication entre les tribunaux et permet aux citoyens de suivre leurs dossiers en ligne, d’obtenir des informations sur leur état d’avancement et même de demander des copies de jugements sans avoir à se déplacer.
Amélioration de la qualité du système judiciaire
L’amélioration de la qualité de la justice est une priorité constante. Cela passe par une formation continue des magistrats et des greffiers, afin de garantir qu’ils restent à jour avec les évolutions juridiques et technologiques. Avant 2016, la formation des magistrats se faisait dans des conditions limitées, avec une capacité de formation de seulement 40 places par an à l’École Nationale d’Administration et de Magistrature. Depuis 2018, l’École de Formation des Professions Judiciaires (EFPJ) a formé 177 magistrats et 100 greffiers, avec un total de 1 281 acteurs du secteur ayant bénéficié d’une formation continue.Cette montée en compétence des professionnels de la justice contribue directement à l’amélioration de la qualité des décisions judiciaires, en assurant des jugements plus équitables et efficaces.
Enfin, l’amélioration des conditions de vie dans les établissements pénitentiaires constitue un aspect essentiel de la réforme de la justice. Avant 2016, les détenus étaient confrontés à des conditions de vie précaires, avec une alimentation insuffisante et une absence de soins médicaux adaptés. Depuis 2018, l’Agence Pénitentiaire du Bénin (APB) gère désormais les établissements pénitentiaires, où deux repas par jour sont fournis à chaque détenu, à un coût de 1 200 francs CFA. Les conditions de vie se sont considérablement améliorées, avec des consultations médicales foraines ayant permis de soigner plus de 10 000 détenus en 2023.
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