À moins d’un an des élections présidentielles en Côte d’Ivoire, l’incertitude règne sur le futur politique du pays. Alors que l’échéance de 2025 approche à grands pas, Alassane Ouattara, président en place depuis 2011, reste indécis quant à sa candidature pour un troisième mandat. Bien qu’il ait affirmé ne pas avoir encore pris de décision, il a réitéré son désir de « continuer de servir » son pays, un message volontairement ambigu qui alimente les spéculations et laisse ses adversaires dans l’incertitude.
Selon Netton Prince Tawa, enseignant-chercheur en sciences politiques, « pour démarrer une véritable campagne, il faut d’abord savoir qui est son adversaire », et c’est là toute la stratégie de Ouattara : maintenir une pression sur l’opposition, tout en gardant les cartes en main. Du côté du Rassemblement des Houphouëtistes pour la Démocratie et la Paix (RHDP), le soutien à Ouattara est unanime. Les dirigeants du parti sont tous d’accord pour dire que l’actuel président reste l’unique figure capable de garantir la stabilité et le progrès du pays.
Des personnalités comme Cissé Ibrahime Bacongo, ministre et gouverneur d’Abidjan, défendent sans réserve la candidature d’Ouattara, évoquant l’expérience et l’énergie d’un homme qui, malgré son âge, continue de porter le pays vers l’avenir. Cette position est également partagée par Adama Bictogo, président de l’Assemblée nationale, qui soutient qu’Ouattara est le garant de la stabilité et du développement de la Côte d’Ivoire.
Cependant, des décisions récentes, comme la nomination de l’ancien Premier ministre Patrick Achi au poste de conseiller spécial, ont alimenté les rumeurs. Pour certains analystes, cette nomination pourrait refléter un désir de Ouattara de tenir Achi éloigné des ambitions présidentielles potentielles, afin de préserver son emprise sur le pouvoir. À 60 ans, Achi reste une figure clé de la majorité, avec une forte expérience politique et un profil susceptible de séduire les électeurs.
Opposition en pleine recomposition
L’opposition, elle, traverse des turbulences internes, principalement au sein du Parti Démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI). Depuis la mort de l’ex-président Henri Konan Bédié en 2023, Tidjane Thiam, ancien ministre et économiste de renom, a pris la tête du PDCI. Mais son autorité est mise à l’épreuve par des dissensions internes. Jean-Louis Billon, un homme d’affaires influent et cadre du parti, conteste ouvertement la manière dont la direction du PDCI est menée.
Ambitieux et déterminé à briguer la présidence, Billon défie le processus de désignation interne du parti, mettant en lumière la division qui secoue le PDCI. Bien que Thiam ait proposé une convention pour désigner le candidat du parti, l’absence de consensus sur la question a créé une atmosphère d’incertitude.Les tensions internes sont allées jusqu’à la convocation d’un conseil de discipline pour Billon, mais ce dernier a été annulé à la dernière minute, alimentant davantage de spéculations sur les tensions qui secouent le PDCI.
Le débat sur la nécessité d’une primaire pour trancher la question de la candidature s’intensifie. Jean-Louis Billon prône une approche plus démocratique, qui pourrait mobiliser plus largement les militants, mais cette proposition reste controversée au sein du parti.
Candidatures dispersées et incertitudes judiciaires
En parallèle, plusieurs autres figures politiques se préparent à entrer dans la course à la présidentielle. Simone Ehivet Gbagbo, l’ex-épouse de Laurent Gbagbo, a annoncé son intention de briguer la présidence avec son mouvement, le MGC. Pascal Affi N’Guessan, ancien Premier ministre et président du Front Populaire Ivoirien (FPI), continue de défendre son projet de rénover son parti et de proposer une alternative politique.
Cependant, les figures les plus emblématiques de l’ère Gbagbo, telles que Laurent Gbagbo lui-même, Charles Blé Goudé et Guillaume Soro, restent inéligibles en raison de condamnations judiciaires qui pèsent sur eux. Leur retour sur la scène politique dépendra largement de la position du pouvoir en place. Comme le souligne Netton Prince Tawa, « le temps est un facteur déterminant ». Alassane Ouattara pourrait, en dernier recours, autoriser certaines de ces candidatures, mais ce serait probablement dans l’optique de limiter leur influence sur l’échiquier politique.
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